La Fabrique de poupées

La liberté est une chose précieuse

Londres, 1850. L'Exposition universelle va bientôt ouvrir ses portes dans le tout nouveau Crystal Palace, et les badauds se pressent pour venir admirer cette merveille. Parmi eux, Iris, modeste employée dans un magasin de poupées, à la beauté mâtinée de difformité, qui rêve de devenir artiste peintre. Et puis il y a Silas, taxidermiste amateur de macabre et de curiosités, désireux d'y exposer ses créatures. Ces deux-là se croisent, et leurs destins en seront à jamais bouleversés. Iris accepte bientôt de poser pour Louis Frost, un jeune peintre préraphaélite. Avec lui, le champ des possibles s'élargit, et le modèle, avide de liberté, découvre peu à peu l'art et l'amour. Mais c'est compter sans Silas, qui rôde non loin de là, tapi dans l'ombre, et n'a qu'une idée : faire sienne celle qui occupe toutes ses pensées, jusqu'à l'obsession...

Campée dans un Londres à la Dickens, La Fabrique de poupées met en scène la détermination d'une femme à s'affranchir de sa condition. C'est aussi un conte cruel, raffiné et résolument moderne, au suspense maîtrisé, qui explore avec une précision chirurgicale les frontières entre l'amour, le désir et la possession.

Par Elizabeth Macneal. Aux éditions France-Loisirs dans mon cas.

 

💙💙💙💙,5

« Sa chevelure rousse lui rappelle le premier renard qu'il a trouvé. Un animal au pelage roux, au ventre couvert d'un duvet blanc comme de l'alumine. Il avait été émerveillé par la vigueur des os de la mâchoire, couleur mastic, et des dents qu'elle abritait. Ce renard débordait de vie ! »

Ne vous fiez jamais à un livre par sa couverture. La Fabrique de poupées est un roman qui m'a énormément perturbée, bousculée, écœurée. L'écriture est excellente, fluide. Les descriptions sont percutantes, tranchantes. A aucun moment on ne trouve de répit dans ce récit en trois actes.

J'ai trouvé du King dans ce livre. Une tension psychologique formidable. On suit le parcours d'Iris dans ce Londres du milieu du XIXème. La condition des pauvres gens et plus particulièrement des femmes. Il n'y a pas de vernis, pas de sucré pour adoucir la situation. Les misérables ont la vie dure et peu de chance de salut.

Le taxidermiste Silas est une toile de fond, une ligne qui suit la trame principale. On attend le moment où il va y avoir collision. On espère jusqu'au bout que le pire soit évité. En vain. Les sabots d'un cheval coupent court à tout espoir.

J'ai passé plusieurs jours la tête sous l'eau, à aspirer quelques goulées d'air frais. La conclusion de ce livre est judicieuse. Pas d'épilogue interminable, juste un article de journal, qui veut tout dire. Ou rien.

Je le recommande vivement pour ceux qui aiment souffrir d'une lecture ou se sentir angoissés. Dans le bon sens du terme. Ce n'est pas un livre pour enfants, ce n'est pas joyeux ou bucolique. C'est intimiste, violent. Si c'est un premier roman, c'est un coup de maître.

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